Tinnitus – Acouphènes

1. Les acouphènes qu'est-ce que c'est ?

Les acouphènes sont des bruits anormaux qui peuvent être à type de bourdonnements d’oreille ou de sifflement, que le patient entend de façon intermittente ou permanente, en l’absence de toute source sonore dans l’environnement. Ils peuvent être uni- ou bilatéraux, simples ou complexes et associés ou non à une surdité. Les acouphènes sont un véritable problème de santé publique. A partir de différentes études épidémiologiques, leur prévalence est évaluée à 1% à 8% de la population adulte. Une enquête portant sur plus de six cents patients acouphéniques a montré de plus que 26 % avaient une altération importante de leur qualité de vie avec des modifications notables du comportement : irritabilité, inquiétude, tension, dégradation du sommeil. L’échec de nombreux traitements, notamment médicamenteux, a conduit quelques équipes à proposer des thérapeutiques fondées sur des concepts radicalement différents.

 

Tout patient acouphénique nécessite un bilan otoneurologique soigneux chez un médecin ORL spécialisé afin d’essayer :

1. de déterminer la cause

2. d’adapter au mieux la conduite thérapeutique.

2. Physiopathologie des acouphènes

Deux types d’hypothèses ont été proposées comme pouvant être à l’origine des acouphènes : une origine périphérique et une origine centrale.

3. Déterminer les conséquences des acouphènes

Différents questionnaires ont été mis au point afin de déterminer les conséquences fonctionnelles, physiques et psychologiques des acouphènes. Ils permettent aussi d’apprécier l’impact d’un traitement donné. Il en existe plusieurs. Les plus utilisés sont :

 

1.The Tinnitus Handicap Inventory (THI) (Newman, Jacobson et Spitzer, 1996), développé spécifiquement dans les pays anglosaxons pour determiner les effets handicapants du tinnitus (25 questions sous-divisées en fonctionnel, émotionnel et catastrophique).

 

2. THQ : le tinnitus handicap questionnaire le plus utilisé en France

Il comprend 27 questions (note de 0 à 100).

4. Examen audiométrique

L’examen audiométrique tonale et vocale, associé à une tympanométrie et à une impédancemétrie, est indispensable. La majorité des acouphènes sont associés à une perte auditive mais 20 à 30% des patients peuvent avoir une audition normale. Ils accompagnent souvent la perte auditive sur les hautes fréquences liée au vieillissement mais aussi la perte auditive secondaire à une exposition au bruit d’origine professionnelle ou durant les loisirs (chasse, concerts).

 

Au cours de cet examen, le médecin ORL essaie aussi de déterminer la fréquence prédominante de l’acouphène (acouphénométrie). La détermination de la fréquence de l’acouphène aide au diagnostique étiologique. Quand il prédomine sur les fréquences graves, il oriente vers une pathologie de la sécrétion des liquides endolyphatiques. Lorsque sa tonalité est sur les fréquences aigues, il est souvent associé à un scotome unilatéral (perte auditive asymétrique sur une fréquence) dont il faudra préciser l’origine.

 

Les potentiels évoqués auditifs peuvent s’avérer aussi nécessaires afin de détecter un éventuel dysfonctionnement du nerf auditif, comme celui induit par un neurinome de l’acoustique. Les potentiels évoqués otolithiques induits par des sons de forte intensité peuvent orienter vers une déhiscence canalaire quand les ondes précoces (P13-N23) sont asymétriques en amplitude.

5. Bilan radiologique

Une IRM centrée sur les CAI doit être demandée en cas d’acouphènes unilatéraux associée ou non à une surdité unilatérale, afin de détecter une éventuelle lésion du nerf auditif. Dans certains cas de surdité de transmisssion, un scanner en coupes fines des rochers peut être utile pour détecter une otosclérose, une atteinte traumatique, ou une déhiscence canalaire.

Neurinome de l’acoustique
Neurinome de l’acoustique

Un bilan biologique doit être réalisé. Ce dernier doit comprendre une NFS, VS, un bilan lipidique, le dosage du zinc et des hormones thyroidiennes. La mesure de la tension artérielle est aussi essentielle.

6. Les traitements

Différents types de traitement peuvent être proposés :

 

• Médicaux

 

Les médications ayant un effet circulatoire comme la trimetazidine et le ginko bilboa (Tanakan) peuvent être utiles. Les agonistes Gabaergiques (neurontin) et dopaminergiques (piribedil) agissent particulièrement sur le système auditif efferent. Les inhibiteurs des voies neuronales afférentes en diminuant l’hyperexcitabilité des centres auditifs comme la carbamazépine (Tegretol) sont aussi préconisés. Des tranquillisants ou des antidépresseurs qui diminuent la recapture de la serotonine peuvent aussi être prescrits. Finalement, des études récentes ont montré que l’acamprozate (un bloqueur des récepteurs NMDA et un agoniste Gabaergique) étaient efficaces dans un certain nombre de cas.

 

• Les techniques de relaxation

 

Des techniques visant à diminuer le degré d’activation du système nerveux autonome (sophrologie, yoga) peuvent être bénéfiques.

 

• Les thérapies cognitives

 

Les thérapies comportementales (TTC) ont fait ces dernières années de nombreux progrès. Elles se proposent d’agir de façon pragmatique et brève en favorisant des stratégies optimales d’adaptation et de "coping" à la fois sur le versant cognitif (par modification de schémas de pensée invalidants) et sur le versant comportemental (par modification des comportements inadaptés). Leur objectif est de faire obtenir à des patients, jusque-là invalidés par leur acouphène, l’état de négligence obtenu spontanément par la majorité des sujets présentant un acouphène. Les voies auditives se projettent non seulement sur le cortex auditif mais également sur le système limbique , qui est responsable de l’état d’anxiété du patient. Les TCC sont également actives sur les états anxieux ou dépressifs préalables, ou secondaires à l’apparition de l’acouphène.

 

• Les prothèses auditives

 

L’appareillage auditif a pour but :

1.de masquer l’acouphène et

2. de diminuer l’asymétrie auditive à l’origine des changements plastiques induits dans les centres auditifs (colliculus inférieur, cortex auditif) et dont les études fondamentales ont montré qu’ils étaient réversibles.

Il est donc possible dans l’avenir que le port d’une prothèse amplifiant sélectivement la zone fréquentielle de la perte auditive puisse traiter l’acouphène sans que le patient ne doive porter de façon constante l’appareil.

 

• La chirurgie

 

Des implants cochléaires de l’oreille moyenne ou interne, des stimulations magnétiques et électriques des aires auditives primaires et secondaires sont en cours d’évaluation après caractérisation sous IRMf des zones corticales anormalement activées .

7. Conclusion

Le médecin ORL n’est plus dépourvu devant un patient acouphénique: Le temps est révolu ou l’on disait au patient « qu’il aurait des acouphènes à vie et qu’il devait s’y habituer ». Le patient doit être rassuré et différentes solutions thérapeutiques des moins agressives (médicamenteux, thérapies comportementales cognitives, prothèses auditives) aux plus invasives (chirurgie) doivent lui être proposées. Une prise en charge multidisciplinaire est souvent utile. Finalement, les progrès en recherche fondamentale ont aidé à mieux comprendre leur origine et à developer de nouvelles thérapeutiques. Ce domaine est encore en pleine expansion.

Acouphènes : examens et traitement - Dr Vidal à Paris